samedi 28 mai 2011

Être une femme à travers le temps

Le costume, c'est un hobby à plusieurs couches.
  • Il y a d'abord la couche paillettes-princesse, à laquelle je suis loin d'être insensible, qui repose sur le simple fait de porter des belles choses, de se prendre pour une princesse et de rêver en déambulant dans les jardins à la française, bercée par les froissements des jupes caressant les buis fraichement taillés. Et déjà ça, c'est cool.
  • Il y a ensuite la couche créative, qui s'incarne dans les longues heures de travail, de recherches d'images d’époques, de tissus qui "font genre pour pas trop cher", puis de découpe, de couture, de démontage parce qu'on s'est trompée, de remontage, d'essayage... Le tout sur fond de programmes du soir de France Inter. 
  • Il y a enfin la couche condition de la femme, qui passe par une expérience physique de ce qu'ont vécu les femmes dans l'histoire, de la réalité du handicap qu'induisent certaines tenues, du temps "perdu" à s'habiller qui grève fortement le temps éventuel de travail, de socialisation, de loisir, d'accès à la culture... Bref le costume qui transforme réellement les femmes en incapables majeures, en jolis objets froufroutants.
Aujourd'hui, j'ai envie de traiter de ce troisième aspect, que j'ai un peu négligé dans ce blog et qui me tient pourtant à cœur. Ce post n'est pas une dissertation sur le sujet, dont le traitement n'a rien de systématique et encore moins de théorique. C'est un retour d'expérience, une tentative de partager avec vous ce que mes sensations de "porteuse de costumes" me permettent d'apercevoir de la vie quotidienne des femmes d'antan. Comme j'étais à Vaux-le-Vicomte pour la journée grand siècle le 22 mai, je vais commencer par le XVIII° siècle.

Petite précision liminaire, on parle ici de femmes aisées, dans la mesure où il faut 14 mètres de tissu (de préférence de la soie) pour faire la moindre robe !

Tout commence par l’habillage. J’ai fait un post en début de semaine qui vous en montre toutes les étapes. Si vous avez besoin d’une révision, allez voir mon précédent post.
L’expérience montre qu’il faut une heure, avec l’aide d’une autre personne, pour en venir à bout (et encore la coiffure ici est vraiment bas de gamme). Ce qui implique au moins trois choses :
  • C’est toujours une heure par jour qu’on ne passe pas à faire des choses qui nous stimulent et nous élèvent physiquement et intellectuellement. En comparaison je pense qu’on met à peu près 30 minutes pour se préparer le matin de nos jours (et encore on prend la douche et repasse sa chemise, autant d’activités que les dames de l’époque ne connaissaient pas !). Ce qui fait une demi-heure gagnée chaque jour pour faire des trucs potentiellement plus intéressants.
  • Sortir demande un minimum d’anticipation. Impossible de se décider au dernier moment pour aller au théâtre ou voir une connaissance. Si vous n’êtes pas habillée, il vous faut un bon délai d’une heure (hors temps de transport, lui aussi plus long) entre la décision de faire et l’acte. 
  • Enfin, sortir demande la complicité d’autrui, fût-ce celle d’une femme de chambre, qui pourra témoigner de votre escapade. Pas moyen donc d’aller voir votre amant en douce sans que personne ne s’en rende compte. S’il veut savoir, votre mari n’aura qu’à demander et toute la maison saura si Madame est sortie, même au beau milieu de la nuit. 

Ainsi l’habillage pour une femme du XVIIIème représente tout à la fois une perte de temps (comme en plus elles vivaient deux fois moins vieilles que nous, ça finit par peser lourd), de maîtrise de son agenda et d’autonomie.

Je m'arrête là pour aujourd'hui. J'avais aussi prévu de vous parler corset et panier mais mon laïus est déjà assez long... Je vais le découper en tranches pour mieux vous le servir chaud !

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