mercredi 22 juin 2011

Zoom sur mes souliers pour la journée grand siècle de Vaux le Vicomte

Autant le dire de suite, le procédé est sauvage mais il pourra peut-être vous intéresser quand même. Il s’agit de donner une allure XVIIIème à des chaussures contemporaines :

  • Sans aucune connaissance en cordonnerie
  • Sans compromettre d’autres transformations ultérieures des mêmes chaussures
  • Le tout en moins d’une heure !

L’idée est de ne pas intervenir sur la chaussure elle-même mais de fabriquer une languette amovible qui lui donne un aspect soulier.
avant
après
Pour cela il faut :

  • 20 cm de tissu de la même couleur que la chaussure (une astuce consiste à jouer sur l’aspect mat/brillant du tissu pour atténuer les éventuels écarts de tons avec le cuir de la chaussure)
  • De l’entoilage
  • De l’élastique (de quoi faire le tour de chacun de ses pieds)
  • Des rubans et déco en tous genres

On commence par découper dans le tissu quatre pièces ainsi faites :
On entoile deux d’entre elles (je fonctionne toujours au thermocollant mais j’imagine qu’un entoilage cousu va aussi très bien).
Endroit contre endroit, on coud les pièces deux par deux en laissant ouvert le côté marqué en vert (il sera à l’intérieur de la chaussure, non visible)

On crante les surplus, retourne, repasse
On fixe les élastiques sur les points rouges. Attention à bien mesurer la longueur d’élastique : trop longs ils ne serviront pas à grand-chose, trop courts ils vous serreront le pied et seront inconfortables.
Maintenant on passe à la décoration. À titre d’info j’ai mis sur les miennes :

  • un rang de frou-frou tout le long de la limite entre la languette tissu et la chaussure pour la masquer un peu
  • un gros nœud au milieu de la languette, qui fait office de lacet

C’est fini, ! Et ça s’enfile comme ça (en rose c'est le pied , en noir le contour de la chaussure et en rouge la languette avec son élastique qui passe sous le pied à l'intérieur de la chaussure)

lundi 20 juin 2011

Être une femme à travers le temps (suite et fin)

Ceci est le troisième et dernier épisode d’une série de post sur les femmes au XVIIIème siècle qui traite :
De l’habillage : cliquez ici pour réviser
Du corset : cliquez ici pour réviser
Des paniers et jupes : lisez la suite !

Pour commencer, il faut savoir que les "paniers" sont des jupons baleinés qui se placent sous la robe. ils sont de forme ovoïde et donne cette allure si particulière au XVIIIème siècle : très large vu de face et très fine vue de profil. Je vous renvoie vers cette page web pour en voir un exemple, les miens sont trop moches pour être pris en photos (c'est un tas de gros scotch de déménagement marron et tubes en plastique de chez Casto...)

Les observations du jour vont être triviales, néanmoins fondamentale pour une tentative d'appréhension de la condition des dames d'antan :
  • la première c'est qu'il leur était assez compliqué d'évoluer dans des espaces réduits. Les beaux escaliers creusés dans l'épaisseur des murs des châteaux ou les ballades en forêt entre les arbres n'étaient pas pour elles, ou du moins pas dans cette tenue (car les robes à paniers sont quand même des robes de cour, la plupart des dames portant hors cérémonies des robes plus légères). Les contraintes contemporaines étant d'un autre ordre il est aujourd'hui possible d'affirmer (après test) que les tourniquets du métro ne permettent pas le passage en robe à paniers. Pour prendre les transports en commun ainsi affublée, il faut se faire ouvrir la porte poussettes/fauteuils roulants. 
  • secundo, porter ce genre de tenue contraint les mouvements par  crainte d'accrocher et de briser un objet fragile. Il faut se figurer un changement complet de proportion : vous mesurez désormais un mètre de large et êtes dépourvu de capteurs sensoriels à chaque extrémité. Le risque est à la hauteur de votre nouveau tour de hanches : grand ! Ainsi j'imagine ainsi nos dames faire des gestes tous petits riquiquis, ridicules et précieux... et je les comprends ! La tenue crée donc naturellement un éloignement entre la femme et son univers, car pour ne pas heurter, pour ne pas casser, on se tient éloigné. 
  • enfin, ces tenues sont d'abominables voiles dont la prise au vent est démentielle! Quand Zéphir est de sortie, Madame reste à la maison. de même lorsqu'il pleut : imaginez le poids de la chose imbibée d'eau ! Du coup, ne restent plus que les jours de beaux temps, par lesquels vous aurez plaisir à transpirer tout votre sou dans un accoutrement bien lourd... 
Il ne s'agit pas non plus d'exagérer, s'habiller au XVIIIème siècle n'est pas une torture. Il y a même de très bons côtés (j'aurais grand plaisir à vous parler de la douce caresse des jupes le long des jambes).
Mais s'il est vrai qu'on s'habitue à tout, ce petit aspect de notre histoire commune à toutes nous permet aussi de réaliser que ces belles choses, qu'on aime à porter pour le fun, ne doivent redevenir la norme à aucun prix, sous peine de nous faire replonger illico presto dans les limbes de l'objectivité. N'oulions pas que le costume, n'est pas anodin. Son caractère décoratif ne doit pas masquer qu'il peut être réellement contraignant, physiquement comme symboliquement.

lundi 6 juin 2011

Promenade au Louvre

Le dimanche soir, on ne sait jamais trop quoi faire. Alors nous, on s'habille et on sort ! C'était le 29 mai dernier, aux Tuileries et au Louvre. Comme vous êtes amateurs de photos à en croire mes petites statistiques, voici quelques clichés de Jean Creative Commons License et de moi. 

Je portais ma robe à la française rose. C'est l'occasion pour rappeler deux ou trois essentiels : 
  • la robe à la française est une robe de cours, d'apparat. Elle se porte par conséquent en intérieur (normalement) et sans chapeau. 
  • la robe à la française se caractérise par sa forme, quasi invariante tout au long du XVIIIème siècle : des paniers très larges et étroits qui font apparaître la taille ridiculement fine (enfin, en théorie!), un système de fermeture par l'avant soit sur une pièce d'estomac soit par des compères, et enfin les plis typiques dans le dos qu'on appelle plis Watteau (du nom du peintre qui les peignait si bien. Ce nom a certainement été donné bien après).  



Et Jean portait une partie de son costume Louis XV (sans perruque car depuis qu'on lui a conseillé d'en porter une brune, il ne touche plus à la blanche !) et sans chapeau (car je me suis loupée, il est trop grand).
Après les jardins, nous nous sommes baladés dans les arcades, façon palais merveilleux.


mercredi 1 juin 2011

Être une femme à travers le temps (suite)


Ceci est la suite du post sur l'habillage. Aujourd'hui, nous allons traiter du corset

Le corset est aujourd’hui un outil de mise en valeur du corps et un vecteur certain d’érotisme, relativement élégant s’il est bien fait et pas exposé à la vue du premier venu. Mais le corset du XVIIIème sicle, ce n’est pas du tout ça. C’est un vêtement très lourd et ultra rigide qui impose au corps de la femme une forme qui ne lui est pas naturelle pour deux sous : le buste est entièrement droit, la taille resserrée et la poitrine écrasée et remontée quasi sous le menton (quasi je dis bien !). Pour être plus claire, un petit dessin (vous pardonnerez la qualité médiocre : c’est fait avec paint)
le trait noir figure la peau, le rouge le corset et les zones grises représentent les déformations du corps induites par le port de ce truc. 
Tout cela ne va pas sans conséquence sur les attitudes et le comportement des femmes au VXIIIème : 

  • Le plus évident, c’est qu’on perd en souplesse (merci Monsieur de Lapalisse, belle contribution au débat). Evidemment ça à l’air idiot dit comme ça, mais voici une liste de choses somme toute fort simples que j’ai essayées de faire avec corset et sans succès : m’asseoir confortablement dans un fauteuil en appuyant mon dos contre le dossier (et oui, rien que ça !), me baisser pour ramasser mon éventail (il faut plier les genoux, impossible autrement), éviter une branche d’arbre en inclinant le dos (séquelles encore visibles)… Bref les femmes du XVIIIème étaient quand même très limitées dans leur mouvements (et je n’ai pas encore parlé des paniers!)
  • Les mouvements brusques sont limités par un sentiment que je n’avais jamais connu jusqu’alors (Sophie Marceau, elle, le connaît, mais pas moi) : la peur que mon sein sorte de mon vêtement et apparaisse au grand jour. Si je lève le bras, vu comme ils sont serrés, il y a moyen que tout foute le camp, non ? Alors j’imagine que nos pauvres femmes du XVIIIème sicle devaient faire un peu attention à ne pas lever les bras trop vite… 
  • Les organes sont comprimés, genre beaucoup. Ce qui morfle en premier c’est 
    • les poumons, la cage thoracique ne pouvant plus se déployer en plein, vous êtes essoufflée au moindre effort. On dit toujours que les femmes de cette époque s’évanouissaient à tout bout de champ pour se donner des airs (un comble quand c’est dû au fait qu’on en manque !). Je peux vous assurer qu’elles ne devaient pas avoir à forcer beaucoup le trait. En serrant un peu plus que ce que j’avais fait dimanche dernier, il y a moyen que le cerveau manque assez rapidement d’oxygène. 
    • l’estomac devient tout petit et très vite rempli. Par conséquent, on a très vite plus faim et si on n’arrête pas de manger à temps, on a très vite mal au ventre. 
    • tous les autres organes ensuite sont comprimés. Porté une après midi, le corset n’a pas de conséquence dramatique mais porté quotidiennement dès la sortie de l’enfance (y compris pendant l’adolescence où les cartes de l’anatomie sont si profondément rebattues), il faisait des ravages : des rates atrophiées, des estomacs tout rabougris, fonctionnant mal… les corps des femmes étaient rendus dysfonctionnants par le port précoce du corset (entre autres bien sûr, ce n’est pas le diable en personne ce corset). Elles arrivaient donc toutes faiblardes pour affronter des événements de la vie dont la médecine moderne n’avait pas encore atténué la violence (et je pense bien sûr aux accouchements), et elles tombaient comme des mouches. CQFD. 
  • Le dos est redressé. Je n’ai pas dessiné la colonne vertébrale sur mes petits schémas du dessus parce que je n’aurais pas su faire ça, mais clairement elle est concernée. La colonne vertébrale, vue de côté, forme naturellement un S. Je pense que la courbe du bas est redressée par le corset. En tout cas c’est là que, lorsque vous l’enlevez le soir, vous avez très très mal. 

Pour finir sur le corset je dirais donc qu’on est très loin de l’image qu’on en a aujourd’hui, qu’il est vraiment gênant, réduit les mouvements de la femme et crée un malaise qui la limite dans ses actions. Et qu’à long terme il a un vrai impact négatif sur le fonctionnement de son organisme.